6/4/25

La Cour constitutionnelle belge valide l’exclusion des créances en compte courant du régime « VVPRbis »

Un mécanisme d’optimisation fiscale soumis à des conditions strictes

Le régime VVPRbis est un mécanisme d’optimisation fiscale qui permet, sous certaines conditions, de réduire le taux du précompte mobilier applicable aux dividendes distribués par une PME : à partir du troisième exercice suivant l’apport de capital, la retenue à la source passe de 30 % à 15 %.

Ce régime attractif est néanmoins encadré par des conditions strictes. Notamment, l’apport de capital doit être effectué en numéraire, c’est-à-dire en « cash ». Les apports en nature, comme un immeuble par exemple, sont exclus. C’est précisément cette exclusion, appliquée à l’apport d’une créance en compte courant d’associé, c’est-à-dire l’argent avancé par l’associé à sa société, qui a donné lieu à un litige porté devant la Cour constitutionnelle.

L’affaire en cause

L’affaire à l’origine de l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 16 janvier 2025 concerne une société de détective privé créée en 2013 par deux associés dont, bien entendu, seul un tiers du capital avait été libéré initialement en numéraire. En 2019, l’un des associés procède à la libération du solde en apportant une créance en compte courant d’associé qu’il détenait à l’égard de la société.

Lors de la distribution de dividendes qui a suivi, la société a retenu un précompte mobilier de 15 %. Le fisc a toutefois rejeté ce taux, lui préférant celui de 30 %. Il considère que le capital de la société aurait été en partie libéré en nature par la conversion de la créance en compte courant. Partant, la société ne serait pas éligible au taux réduit du précompte mobilier de 15%.

La société a contesté cette position devant le tribunal de première instance de Liège. Elle a rappelé que le but du législateur est de ramener des liquidités dans les PME et que l’exclusion des apports en nature était justifiée par le risque d’abus liés à leur surévaluation artificielle. Or, pour les créances en compte courant, il s’agit d’argent, qui ne peut être surévalué (1 € = 1 €). 

La société a en outre fait valoir que, si l’associé s’était d’abord fait rembourser son compte courant de la société, et qu’il lui avait ensuite apporté cette somme, la société aurait pu appliquer le taux réduit. 

Scinder l’opération ainsi aurait conduit au même résultat économique, pourtant, le traitement fiscal, lui, aurait été sensiblement différent. 

Le contribuable a interrogé la Cour constitutionnelle pour savoir si la différence de traitement entre l’apport en numéraire et l’apport de créance en compte courant était contraire aux principes constitutionnels d’égalité et de non-discrimination.

La réponse de la Cour constitutionnelle

Pour la Cour, les choses sont simples. La frontière entre l’apport en numéraire et l’apport en nature est claire, seule le premier bénéficie de l’avantage. Peu importe que ce soit une créance chiffrée en euros : il ne s’agit pas d’un apport en numéraire mais d’un apport en nature qui, de surcroît, laisse la porte ouverte aux manipulations par le jeu des écritures comptables.  

Quant à l’argument de la scission de l’opération, la Cour dit, à peu de chose près, la règle c’est la règle, la personne concernée n’avait qu’à scinder l’opération…

Par conséquent, elle juge cette différence de traitement conforme à la Constitution.

Une raideur en décalage avec la réalité économique… mais aisément contournable

Le formalisme excessif de la Cour suscite des réserves chez certains praticiens, qui critiquent un décalage avec la réalité économique des PME.

Le compte courant d’associé constitue souvent un mécanisme souple et essentiel pour soutenir l’entreprise dans les moments critiques, un véritable filet de sécurité.

Exclure l’apport de cette créance du régime VVPRbis interroge d’autant plus qu’une simple opération, consistant à se faire rembourser la créance avant de la réinjecter en numéraire, permettrait de satisfaire aux conditions légales tout en obtenant exactement le même résultat économique…
Contact

Comme vous êtes unique, vous méritez notre approche personnelle et sur mesure

Travaillons ensemble
Contact